Les aéroports de Terre-Neuve : essentiels, mais leur avenir post-COVID est incertain

Nous vivons des temps étranges. À un moment de l’année où les aéroports débordent habituellement de touristes en quête de soleil, d’hivernants et de voyageurs d’affaires, nous nous retrouvons avec des halls vides et des stationnements déserts. Les transporteurs aériens qui fréquentent Terre-Neuve et Labrador annulent des trajets, les revenus d’affaires sont en déclin constant et personne ne peut prédire ce que l’avenir réserve à l’industrie de l’aviation et aux communautés que nos aéroports desservent.

En tant que résidents de cette province aussi rude que magnifique, nous n’en sommes pas à nos premiers coups durs. Mais nous n’avons encore jamais vu de tempête comme celle-ci, ce qui nous empêche de prédire comment elle se conclura et à quoi ressemblera la reprise.

En tant que peuple, nous persévèrerons sans nul doute, mais bien malin qui pourra dire comment chaque secteur saura s’en tirer au lendemain de cette crise mondiale.

Une chose est certaine : le COVID-19 a démontré combien nous avons besoin les uns des autres et toute l’importance de rester en contact. Il parait simple de définir un service essentiel jusqu’à ce que cette définition soit confrontée à la réalité. Nous voyons maintenant à quel point tant de secteurs et de services sont interdépendants. Aujourd’hui, nous devons compter les uns sur les autres pour survivre, comme demain nous en ferons de même pour prospérer.

Aujourd’hui, nos aéroports jouent un rôle critique afin d’appuyer nos communautés et le système de santé dans sa lutte contre le COVID-19. À titre de service essentiel, nos aéroports gardent Terre-Neuve et Labrador en contact avec les besoins de nos communautés en matière de sécurité et de santé. Nos aéroports facilitent les services d’ambulance volante, acheminent chaque jour des tests de COVID à la capitale de la province, et nos partenaires transporteurs continuent de maintenir les routes essentielles afin de déplacer médecins, produits, fournitures et fret.

Au moment où ensemble, nous traversons cette crise, nous ne pouvons pas ne pas penser à comment nous récupèrerons ensemble et à quoi cette remontée ressemblera. À Terre-Neuve et Labrador, les aéroports sont la bougie d’allumage de l’économie pour les entreprises, le tourisme et le commerce, en contribuant plus d’un milliard de dollars en impact économique annuel et en assurant plus de 5 000 emplois équivalent temps plein.

Bien qu’il faudra peut-être quelques mois avant que les voyages ne reprennent, le moment est propice à la planification de la récupération du secteur touristique de notre région. Les aéroports jouent un rôle critique à cet égard. Le secteur de l’aviation a besoin d’un soutien essentiel pour veiller à ce que l’industrie du tourisme de Terre-Neuve et Labrador soit prête à accueillir des visiteurs dès que les autorités de santé jugeront qu’il est sécuritaire de le faire.

La triste réalité, c’est que les aéroports de notre province sont en position plus que précaire après la chute marquée de l’achalandage et des revenus. Nous prévoyons une baisse de 80 % à 90 % de l’achalandage entre mars et juin et une réduction de 70 % de la capacité totale en 2020. Cette situation aura un impact substantiel sur l’encaisse et la viabilité financière future de nos aéroports, et son effet en aval sera dévastateur sur nos communautés respectives.

Les projections respectives de pertes pour les autorités aéroportuaires de Terre-Neuve et Labrador sont de l’ordre alarmant de 38 millions de dollars environ. Personne ne sait combien de temps la récupération durera et à quel moment les niveaux d’achalandage reviendront aux seuils de 2019. Ce que nous savons par contre, c’est qu’il sera à toute fin pratique impossible de récupérer sans une intervention et un soutien significatifs de la part du gouvernement fédéral.

Le gouvernement du Canada a récemment annoncé un soutien au Système national des aéroports (SNA) en différant de 10 mois les paiements de loyer sur les terres fédérales en 2020. Les loyers des aéroports sont des frais de commission que nos grands aéroports versent au gouvernement fédéral en fonction de leurs revenus bruts. Il s’agit d’un bon premier pas pour le réseau canadien des aéroports, une mesure nécessaire pour soulager les contraintes d’encaisse des plus importants aéroports du pays, mais elle n’aura qu’un impact marginal sur les aéroports de notre province. À cause du déclin rapide des revenus, St. John’s sera le seul aéroport membre du SNA à pouvoir se qualifier pour cette aide au loyer, qu’on prévoit ne s’élever qu’à 145 000 $ à peine en 2020, soit 0,5 % des revenus perdus. L’ensemble des aéroports de la province aura besoin de bien plus pour remédier au grave déséquilibre entre les baisses de revenus et les dépenses fixes.

Un soutien beaucoup plus substantiel est requis pour que les aéroports de notre province puissent surmonter les défis de liquidités immédiats et demeurer viables jusqu’à la récupération. Pour compenser la baisse des liquidités, nos aéroports ont besoin d’aide financière sous forme de soutien financier direct non remboursable destiné à compenser les pertes d’exploitation.

Nous nous attendons à ce que des années s’écoulent avant que l’industrie de l’aviation ne puisse se remettre. Chaque écosystème aéroportuaire, des intervenants de chez nous aux lignes aériennes qui nous desservent, fait face à des défis pour lesquels personne n’aurait pu se préparer. Notre capacité de rebondir après l’impact de la COVID-19 affectera directement la reprise économique de notre province et les nombreux secteurs qui dépendent du service aérien.

Pour l’instant, nous nous affairons à tracer ensemble le cap vers l’avant, mais nos aéroports ont suspendu plusieurs de leurs projets d’immobilisation. Des portions entières de nos terminaux sont fermées afin de conserver l’énergie. Toutes les mesures raisonnables d’économie que nous pouvions implanter ont été mises en place. Mais ça ne suffira pas.

Dans ces moments difficiles, nous avons l’espoir de voir la lumière au bout du tunnel. Nous constatons des signes d’une reprise précoce dans les pays touchés en premier par le virus. Nous voyons le gouvernement soutenir la population et les entreprises affectées par le COVID-19, empressé d’agir pour soutenir cette province pendant ces moments difficiles. Nous avons confiance que le gouvernement sera présent pour soutenir nos aéroports alors que nous poursuivons nos efforts essentiels. En demeurant en contact au cours des semaines et des mois à venir, nous prospèrerons de nouveau.

Peter Avery, président-directeur général, Aéroport international de St. John’s
Reg Wright, président-directeur général, Aéroport international de Gander
Tammy Priddle, présidente-directrice générale, Aéroport régional de Deer Lake
Goronwy Price, P-DG, Aéroport de Goose Bay
Brenda Martin, P-DG, Aéroport de Stephenville

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